Echos de presse

Le jeudi 19 octobre 2006, à 11h00, une trentaine d’anciens étaient présents au camp de La Fresnaye pour la parution officielle du livre sur l’histoire des 50 premières années du camp.

Devant le grand feu ouvert de la Sachemerie, la conférence de presse a débuté par un petit drink et un mot d’accueil du président fédéral de la FCS, Pierre Scieur, avant la présentation de l’ouvrage par son commanditaire, Dominique Schwarts, et ses auteurs, Thierry Scaillet et Luc Marcovitch. 

De gauche à droite : Thierry Scaillet, Luc Marcovitch, Dominique Schwarts et Pierre Scieur
De gauche à droite, Thierry Scaillet, Luc Marcovitch, 
Dominique Schwarts et Pierre Scieur

Parmi les invités, étaient présents d’anciens responsables du camp de La Fresnaye, parmi lesquels Nella Groos, Max et Lisette Schwarts, outre les anciens commissaires FSC Paul Doutrepont et Jean Vandervelden, ainsi que le neveu d’Henry Brifaut, Jean-François de le Court, et de nombreux autres anciens qui ont connu le camp au cours de ses cinq premières décennies.

Évocation par Christian Laporte

Dans l’histoire du scoutisme belge, le domaine de La Fresnaye occupe une place très particulière. Depuis la fin de 1938, ce lieu un peu mythique à quelques kilomètres de Bruxelles a beaucoup contribué à l’essor de l’art de vivre selon Baden-Powell.

La Fresnaye… : pour des générations de scouts catholiques, ce nom qui fleure bon l’environnement forestier évoque des fameuses courses dans les bois, la construction de cabanes, des veillées du tonnerre de Dieu autour d’un feu de camp et surtout la grande fraternité de tous ceux (et de toutes celles !) qui se sont sentis interpellés par le message de Baden-Powell ! Sis à Tourneppe – dites : Dworp ! – à un jet de pierres de Bruxelles et aux limites de Hal, le domaine, créé voici près de 70 ans par la Fédération des scouts Catholiques pour accueillir les formations aux méthodes du fondateur des chefs scouts, des routiers et des aumôniers continuent à recevoir bon an, mal an des dizaines d’unités de la capitale toute proche qui viennent y prendre un bon bol d’air dans un cadre qui n’a pratiquement pas changé.

A la veille du lancement de l’année du centenaire du premier camp scout de l’histoire qui donnera lieu en 2007 au plus grand rassemblement scout jamais vu en Belgique et à une noria d’activités festives, rien de tel qu’une bonne louche de nostalgie chauffée au feu de bois qui n’empêche pas qu’à la rue de Dublin, l’aggiornamento scout reste un souci très quotidien.

Ce n’est, évidemment, pas un hasard, si la FSC est devenue Les Scouts avec dans son sac à dos un message de plus en plus pluraliste sans cependant renoncer aux valeurs évangéliques qui font toujours sa spécificité.

L’occasion faisant le routier, l’idée a germé de faire retracer le passé de la Fresnaye par des historiens spécialisés, en l’occurrence Thierry Scaillet, assistant à l’Université catholique de Louvain, déjà auteur d’ouvrages sur les mouvements de jeunesse qui est aussi conservateur du Centre historique belge du scoutisme, et Luc Marcovitch, membre fondateur du centre précité mais également administrateur au musée du Scoutisme et du guidisme à Louvain.

A la base du projet, Dominique Schwarts, un homme de communication qui… n’a jamais été scout mais qui a néanmoins passé des centaines de week-ends sur place parce que son père y avait été « routier de service » de 1953 à 1967.

Un bon petit million (!) d’« anciens » du scoutisme peuvent le remercier car, grâce à sa petite idée, le camp de Dworp entre définitivement dans la mémoire collective.

Qui se souvient ainsi encore que sa création doit beaucoup à la générosité de la famille Solvay ? Que cette dernière dans un souci d’égalité idéologique qui l’honore veilla à offrir également un terrain à l’« autre » association scoute, pluraliste celle-là, des Boy-Scouts de Belgique ? Toujours est-il qu’à la veille de Noël 1938, la FSC et les BSB prirent officiellement possession des lieux pour y débuter, chacun de son côté, des aménagements afin de pouvoir y accueillir leurs troupes, au propre comme au figuré.

La Fresnaye était née alors que l’autre domaine prit le nom de domaine de Wolveringen. Si chacun mena sa vie propre, le métissage des esprits y livra souvent de très heureux résultats.

La préparation du « premier terrain officiel des camps-écoles et des camps permanents de la FSC » débuta pratiquement au lendemain du don généreux des Solvay !

En effet, dès le lendemain de Noël, les routiers du clan de la Cognée de la 7e unité Notre-Dame du Sacré-Cœur à Etterbeek se mirent à défricher les lieux. De son côté, le commissaire fédéral adjoint de la FSC, Henry Brifaut avait dressé les premiers plans d’aménagement. La famille Solvay en fut tenue au courant en permanence. L’hiver n’empêcha pas les travaux : début mars 1939, les archives nous précisent que l’on avait déjà recensé plus de 900 journées de travail.

Au Revoir

De quoi attirer l’attention de la rédaction du « Petit XXe », le supplément pour la jeunesse du journal « Le XXe siècle » qui accueillit les premières œuvres d’Hergé. Aux premières heures du camp qui se confondirent bientôt avec celles, sombres, de la Seconde Guerre mondiale, un certain Jacques Brel arpenta aussi à plusieurs reprises les sentiers de Tourneppe. Si « Phoque Hilarant » y vint avec la 41e Unité Albert Ier de Schaerbeek, c’est parce qu’il participa aussi aux travaux de construction d’une cabane. Dans le compte rendu non dépourvu d’une juvénile fraîcheur qu’il en dressa pour le carnet de bord interne, le chanteur ne précisait pas s’il avait gardé son uniforme, mais c’est peu probable car l’occupant avait interdit de le porter. Autre interdiction édictée par les nazis : celle de loger sous tente. Là l’ukase fut contourné de manière très pragmatique : les scouts de passage furent invités à camper dans des huttes qu’ils construisaient eux-mêmes à grands renforts de branchages dénichés dans les environs immédiats !

Aumônier de l’Armée secrète

L’occupant aurait sans doute eu intérêt à mieux surveiller certains aumôniers sur place. Tel le père dominicain, Dominique Pire. Lié à une meute hutoise, celui qui devait plus tard obtenir le prix Nobel de la paix était, en effet, aussi aumônier dans l’Armée secrète et un agent des services de renseignement et d’action. Ce ne fut pas le seul résistant à se rendre sur place et la Gestapo le savait.

C’est pourquoi trois semaines avant la libération de Bruxelles, le camp fit l’objet d’une descente musclée des collaborateurs de l’ennemi. Lieu ouvert sur la société et à ses valeurs traditionnelles et de ce fait hostile à l’idéologie des très éphémères maîtres de la Belgique, le camp de La Fresnaye accueillit forcément des scouts ou des routiers qui étaient en délicatesse avec l’ennemi, pour cause de résistance ou parce qu’ils étaient réfractaires au service du travail obligatoire.

Il semble même que le Front de l’Indépendance aurait utilisé les camps des scouts pluralistes et catholiques comme une zone d’entraînement au tir pour les Milices patriotiques. La Gestapo s’était déjà aventurée une fois à Dworp à la recherche d’un réfractaire dont on disait qu’il s’était caché aux abords du camp mais ce n’était rien à côté de la « descente » du 12 août 1944. Ce jour-là, des routiers de la 30e Unité Sainte-Gertrude à Etterbeek ont eu la surprise de tomber sur 6 membres de la SS Wallonie qui les amenèrent au camp des scouts pluralistes. Surprise : ils y retrouvèrent 20 scouts tenus en respect par des membres de la Gestapo. Débuta alors une longue nuit d’interrogatoires pour certains d’entre eux. Les collabos étaient à la recherche d’une cache d’armes et ne les trouvant pas, se mirent à détruire tout ce qui leur tombait sous la main. S’acharnant sur un des chefs scouts, ce dernier finit par avouer où l’on avait entreposé des pistolets et des mitraillettes.

A l’aube, les feld-gendarmes emmenèrent un bon nombre d’entre eux au siège de la Gestapo, avenue Louise puis à la prison de Saint-Gilles. Le 1er septembre, une partie fut encore envoyée en Allemagne alors que les autres eurent la chance d’être dans le train-fantôme, le dernier à partir de Bruxelles mais qui ne dépassa pas Muizen grâce au courage des cheminots. Néanmoins, deux d’entre eux, Armand Godfrin et André Van Nuis trouvèrent la mort en Allemagne… Après la Libération, le camp retrouva un certain calme mais rapidement les activités de formation et d’hébergement battirent de nouveau leur plein. L’occasion aussi de tester les vertus de l’hébertisme, entendez : une méthode naturelle d’éducation physique imaginée par un officier de marine française, Georges Hébert dont la particularité était de permettre un développement harmonieux du corps à partir de mouvements naturels.

Face aux demandes croissantes, la FSC décida de « parfaire la Fresnaye », en d’autres termes : d’améliorer ses infrastructures. D’année en année, un vrai petit village tapi dans les bois avait pris forme. Pour les scouts catholiques, l’aventure pouvait se poursuivre ; ce qui ne fut pas le cas pour les BSB qui décidèrent de fermer leur camp en 1954. La Fresnaye connut alors un âge d’or qui coïncida aussi avec la préparation de l’Expo universelle de 1958. Une belle opportunité encore pour l’équipe de La Fresnaye : afin de permettre à des jeunes moins aisés de vivre cet événement de dimension mondiale, il fut décidé de mettre à leur disposition des pavillons… 58 en bois. Une nonantaine furent érigés avec tout le confort nécessaire, doublés d’un restaurant et même de boutiques de souvenirs ! Ils furent implantés finalement à l’avenue de Lima, à moins de 200 mètres de l’entrée de l’Expo. L’aumônier de service en fut notre confrère le Père Fabien Deleclos. Après l’exposition, les pavillons furent recyclés dans les paroisses mais aussi dans certaines écoles ! L’opération fut aussi rentable sur le plan financier puisque la FSC en retira un million de FB de bénéfices. Bref, de quoi ravir La Fresnaye et la relancer pour des siècles et des siècles ?

Non, car la montée de l’intolérance linguistique, ou pour le dire plus positivement, l’avancée du fédéralisme mit le domaine de la FSC quelque peu en porte à faux. C’est ainsi que l’on dut renoncer à assurer les formations à Dworp. De fait, les subsides francophones ne pouvaient plus y être attribués et les scouts catholiques les transférèrent donc à Ottignies (château de Clerlande) et à Courrière.

Des messes en… néerlandais

Mais sur un plan de coexistence intercommunautaire, il n’y eut pas et il n’y a toujours pas de réels problèmes. Afin de s’attirer les grâces du voisinage, les responsables de La Fresnaye eurent la bonne idée avec l’aide de certains voisins d’organiser régulièrement des messes en… néerlandais. Un geste de bonne volonté très apprécié par le voisinage qui fréquenta volontiers les lieux plutôt que l’église du village de Tourneppe !

Et comme ce fut le cas, les camps et autres week-ends d’unité purent s’y poursuivre sans problème. Il est vrai que l’on avait bien précisé aux francophones de ne jamais hisser de coq wallon. Et la mesure s’appliqua aussi au lion flamand.

Le drapeau tricolore continua, pour sa part, à flotter régulièrement. Notamment le dimanche 24 mai 1964 lorsque le site de Dworp accueillit le premier rassemblement national de tous les scouts et guides handicapés de Belgique. Un événement que rehaussa de sa souriante présence, la reine Fabiola. A propos de personnalités royales, une énigme demeure : s’il est avéré que la princesse Joséphine-Charlotte rendit un jour visite au camp de la FSC, l’on n’a jamais pu confirmer que son frère, le futur roi Baudouin y fit escale. Certes, l’entrée du camp lui est dédiée – l’artère a nom Prins Boudewijnlaan… - mais l’on n’a jamais (re)trouvé de photos de son passage.

Aujourd’hui, La Fresnaye a sans doute perdu une part de sa splendeur mais l’endroit reste un haut-lieu du scoutisme.

La Libre Belgique, 31 octobre-1er novembre 2006, p. 34-35
Rubrique « Grand Angle – Nostalgie »

 

La presse était représentée par Christian Laporte pour La Libre Belgique, Estelle Waterman pour Le Soir et Ludivine Nolf pour La Dernière Heure. Des échos de cette conférence de presse sont parus respectivement dans :

  • La Dernière Heure, 20 octobre 2006, page 17.

  • La Libre Belgique, 21-22 octobre 2006, page 54.

  • La Libre Belgique, 31 octobre-1er novembre 2006, pages 34-35.

  • Le Soir, 6 novembre 2006, page 7.

 La parution de l’ouvrage a aussi été signalée dans :

  • Plus Magazine, n°219, septembre 2006, p. 21.

  • Objectif Tintin (site internet interactif des amis de Tintin), 20 octobre 2006. Voir www.objectiftintin.com/news

  • Bivouac (site internet de la 1er unité Albert Ier à Charleroi). Voir www.scoutspremiere.org/news

  • Waterloo.be info, n°968, 9 novembre 2006, p. 3.

  • La Quinzaine (bi-mensuel de la communauté universitaire de l’UCL), n°258, 1er décembre 2006, p. 6.

  • Louvain Newsletter (mensuel en ligne destiné aux Alumni et Amis de l’UCL), n°3, décembre 2006.

  • Revue Saint-Boniface-Parnasse, n°182, décembre 2006, p. 28-30.